​Se reconnecter au silence de Dieu - Christophe HERINCKX

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Les vacances d’été sont à nos portes. Un temps de voyage ou de détente pour beaucoup, de repos mais aussi de ressourcement. Une invitation à un voyage vers le désert intérieur, sur les ailes du silence,

à la rencontre de la Source de Vie

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‘Vous autres, venez à l’écart dans un lieu désert et reposez-vous un peu’. Car il y avait beaucoup de monde qui venait et repartait, et eux n’avaient pas même le temps de manger. Ils partirent en barque vers un lieu désert, à l’écart." (Marc 6,31-32). Cette invitation, Jésus l’adresse à ses disciples après leur retour de mission (cf. Mc 6,6-13). Ils sont fatigués, mais les sollicitations ne s’arrêtent pas pour autant. Jésus les emmène donc à l’écart, mais les foules vont les rejoindre. Suit alors le miracle de la multiplication des pains, auquel les disciples sont associés. Une parabole en acte du don de Dieu, celle de la vraie nourriture que sont la Parole de Dieu et l’Eucharistie, du vrai repos que seule donne la présence de Dieu. Les vacances qui approchent pour beaucoup sont un temps de repos, passant par une pause dans le travail, de la détente, un dépaysement, un changement de rythme. Une nécessité pour notre équilibre physiologique et psychologique. Mais, pour un "repos intégral", le ressourcement spirituel est également indispensable, qui redonne force et vie à notre esprit, le cœur de notre être, notre moi le plus profond.

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La Source vivante de notre esprit.

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Comment ressourcer notre esprit? La réponse à cette question pourra sembler paradoxale: on ne se ressource pas soi-même! On peut laisser reposer son corps: en suspendant certaines activités, dans le sommeil… Nous pouvons également laisser reposer notre esprit, tout comme notre intellect, notre sensibilité, notre psychisme. Mais, tout comme notre corps doit être désaltéré par de l’eau et nourri par des aliments, notre esprit ne peut être ressourcé que par une nourriture extérieure ou, plus exactement, transcendante. Du moins, dans la compréhension chrétienne de la vie spirituelle. Car pour la spiritualité chrétienne, la nourriture de l’esprit ne vient pas de lui-même, mais trouve sa source dans la Réalité qui est plus que lui, qui est au-delà de lui, tout en étant présent en lui. "Ce n’est pas seulement de pain que l’homme vivra, mais de toute Parole sortant de la bouche de Dieu." (Mt 4,4 cf. Dt 8,3) Reformulons dès lors la question: comment notre esprit peut-il être ressourcé par la Parole de Dieu, par Dieu qui parle à notre esprit, à notre cœur? C’est à cette question que tentent de répondre de nombreux saints et spirituels chrétiens, aujourd’hui comme hier. A travers la diversité des voies qu’ils et elles proposent, un objectif similaire se dessine fréquemment: nous ouvrir à la Source vivante de notre esprit, au "Je Suis" qui donne continuellement la vie du Ressuscité à notre "je", dans l’Esprit qui nous est donné.

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L’addiction au bruit.

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Le flux de cette Source intérieure est souvent entravé par des obstacles qui l’empêchent de nous atteindre pleinement et de nous ressourcer. Notre esprit ressemble alors à une mare d’eau plus ou moins stagnante. Avec, comme manifestations possibles, une perte de vitalité essentielle, un repli sur soi, une absence de joie, une forme de lassitude profonde ou de désespérance par rapport à la vie… Parmi ces obstacles, pointons-en un en particulier: le bruit. Un bruit omniprésent, omni-envahissant, extérieur et intérieur, qui entrave toute connexion à soi, aux autres, à Dieu. Ce bruit n’est donc pas que sonore. Il est aussi, notamment, visuel et numérique. Aujourd’hui, il prend souvent la forme d’un flux incessant de stimuli et d’informations de toutes sortes qui nous sollicitent à chaque seconde à travers les écrans, en particulier les réseaux sociaux. Des sollicitations qui excèdent largement notre capacité d’assimilation, mais qui créent une véritable addiction. Des études récentes tendent à montrer que, lorsqu’on "clique" sur un contenu, l’apparition de celui-ci déclenche dans notre cerveau un afflux de dopamine, familièrement connue sous le nom d’"hormone du plaisir". Peu importe l’information qui s’affiche, c’est ce mécanisme qui crée l’addiction au clic. D’où le succès des vidéos et des messages de plus en plus courts, favorisant la surconsommation de bruit. Un cercle vicieux s’installe alors. L’addiction au bruit empêche l’éclosion d’une vie intérieure, et l’absence d’intériorité créant un vide, ce vide est comblé par toujours plus de bruit.

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Le bien-être du silence

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Pour sortir de cercle infernal, il est essentiel de se déconnecter du bruit pour pouvoir se reconnecter à la Source intérieure. Comment? En (re)découvrant le silence, d’abord extérieur puis intérieur. Par où commencer? D’abord en décidant de faire silence, de se taire, de se déconnecter de son écran ou de son casque. Comme un acte de liberté, de résistance même, à l’invasion du bruit. De nombreux obstacles peuvent venir entraver cette décision. Le premier se situe en amont de celle-ci. On peut ne pas voir l’intérêt du silence. On peut se sentir bien dans le bruit ambiant comme intérieur, qui souvent est devenu comme un compagnon inséparable de notre vie. A celles et ceux qui pensent ne pouvoir se passer de bruit, on pourrait suggérer d’expérimenter le silence pendant quelques minutes pour commencer, puis quelques heures, ou une journée, dans un lieu retiré. Un parc, une forêt, une église, une abbaye... Une expérience qui peut se révéler étonnamment bienfaisante. Le bruit est comme le mal-être: nous y sommes tellement habitués, il fait tellement partie de nous-mêmes que nous ne le ressentons même plus comme tel, jusqu’à ce qu’on éprouve le bien-être profond du silence.

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Se laisser trouver par Dieu

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Autre obstacle: le silence peut faire peur. Il peut susciter une angoisse diffuse, la peur de la solitude, du vide. Cette crainte de se retrouver seul avec soi-même peut révéler, consciemment ou non, de profondes blessures. L’absence de bruit extérieur peut réveiller une autre forme de bruit intérieur, celui des souvenirs, des traumatismes, des abandons, des échecs. Le silence s’avère alors douloureux, mais nous ne sommes pas obligés d’affronter seuls les anciennes blessures qui se réveillent. Nous pouvons être aidés, par exemple dans le cadre d’un accompagnement, dans un échange de parole et d’écoute. Le silence nous permet de nous entendre, de nous écouter nous-même, et si nous le voulons, il nous rend disponible à entendre et à écouter le Silence de Dieu au cœur de nous-même. La spiritualité chrétienne a ceci de spécifique qu’elle propose d’emblée de chercher Dieu afin de se trouver soi-même, et non l’inverse. Plus justement, chercher Dieu permet de nous laisser trouver par Lui et, dans la communion avec lui, de nous trouver. Chercher Dieu donne un sens, une orientation au silence. Si des moments de vide sont possibles, ils sont nécessaires pour creuser l’attente et le désir de Celui qui, seul peut nous nourrir, nous ressourcer, nous donner la vraie vie. Un beau programme pour nos moments perdus au cours de l’été qui vient.

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